N°3 du 2 février 

 

Chacun connaît ce propos d’Alfred de Musset sur l’apprentissage de la vie humaine passant par la souffrance : « nul ne se connaît tant qu’il n’a pas souffert. » Est-ce à dire que souffrir serait un bien nécessaire pour grandir en humanité ? Oh non, trois fois non !

Pour autant, il n’est aucune expérience un peu sérieuse de la vie humaine, qui ne soit déchirée un jour ou l’autre par la souffrance d’un proche, et aussi par la sienne propre. Plutôt que de faire des considérations sur la souffrance, tenons-nous près des personnes souffrantes. Et cela, sans jugement, sans discours, sans condamnation des autres… Nous tenir au côté de l’homme ou de la femme qui souffre. Sans plus ! Le recevoir, la recevoir, dans sa brisure profonde que seul l’amour divin viendra consoler.

L’évangile selon saint Marc, que nous lisons chaque dimanche du temps ordinaire cette année, confronte son lecteur, dès le début, au drame de la douleur humaine : celle de l’homme dont l’intelligence et le cœur sont emprisonnés par des esprits impurs, celle de la belle-mère de Simon en proie à la fièvre, celle des malades et des démoniaques, atteints de maux multiples qui sont amenés à Jésus par un peuple compatissant, celle d’un lépreux, d’un paralytique…

Loin de nier le drame de la souffrance, l’évangile selon saint Marc nous fait regarder sans faux-fuyant Celui qui a clairement enseigné aux siens qui le suivaient : « le fils de l’homme doit beaucoup souffrir… » (Mc 8,31) Nous savons à quel point cette annonce a provoqué chez Pierre un sentiment naturel de refus. En effet, il n’est jamais facile d’accepter cela, surtout pour ceux qu’on aime. C’était tout à fait incompréhensible humainement de recevoir un Christ souffrant, totalement bafoué, rendu abominable à voir.

Les lettres des catéchumènes adultes sont chacune très différentes, mais toutes sont marquées d’un saisissement d’amour, celui du Christ montrant le chemin, la vérité et la vie, au milieu de la nuit de la souffrance et du doute.

La difficulté éprouvée d’habiter dans un monde tellement traversé par les malheurs et les grandes souffrances, loin de nous accabler, nous poussent à demeurer, sans agitation et sans discours, dans une confiance : « tu ne peux abandonner, Seigneur, le cœur qui se tourne vers Toi. »

Le peuple de Dieu, qui entrera d’ici peu dans l’entrainement du Carême, connaitra la force du réconfort dans la souffrance. Il est un peuple dans lequel chacun peut compter sur l’autre, et dans lequel aucun membre souffrant, ni aucun membre joyeux ne l’est sans ce lien profond avec tous les autres : « nous sommes membres les uns des autres dans le Christ », affirme l’apôtre Paul.

+ Benoît RIVIÈRE